J’ai peur.
Je sens la pulsion de dire,
d’exprimer,
mais j’ai une peur bleue de
me montrer, de m’exposer.
Ça bouillonne à l’intérieur, je le sens, c’est
confus, c’est contenu, c’est agité.
Mais j’ai peur de ce bouillonnement qui
est moi, j’ai peur de ce qu’il est, de ce
qu’il provoque.
Alors, pour éviter son courroux, je
m’incline, je me recroqueville, je me
tais.
Je fais taire celle que je suis, pour le laisser en paix.
Je me mets sous la protection de
l’homme, du puissant, parce que je
préfère être sa fausse amie que sa
meilleure ennemie.
Je me laisse dominer, je me laisse
museler, je me laisse enfermer.
Pour me protéger, pour le protéger, mon
corps me coupe de mon propre désir, je
suis une marionnette sans fil, je
m’éteins, je me contiens, je me
restreins.
Mes ailes, je les dissimule,
mon cœur je le fais taire, ma chair je la
fais discrète.
Mon ventre est noué, ma
gorge est serrée.
Surtout ne pas ressentir
Surtout, ne pas laisser remonter cette
chose, qui vit en moi, qui hurle à
l’intérieur.
Surtout, ne pas lâcher la bête, ce fauve
qui terrorise.
Surtout, ne pas dire.
Surtout, ne pas montrer.
Surtout, ne pas être.
Alors, je me réfugie bien à l’abri de
l’homme, du pouvoir, parce que je
crois qu’être dans le sillage d’un
puissant est plus simple, plus
sécurisant.
Mais je le vois bien, je me maltraite, je
me bâillonne, je me rends esclave.
J’ai tellement peur d’être humiliée
pour qui je suis, j’ai tellement peur
que l’autre me condamne, j’ai
tellement peur de son regard, celui
qui
humilie, qui écrase, qui détruit.
J’ai tellement peur de sa sentence, qui
condamne, qui ôte la vie, parce que
mes profondeurs lui font peur.
L’autre a peur de moi et cela m’effraie.
La peur que je vois dans son regard,
que j’entends dans ces mots, me
brise le cœur.
Je vois qu’elle devient
colère, rejet, condamnation, injures,
blasphèmes.
Je comprends qu’il ne peut rien faire
d’autre que me détruire, parce qu’il
craint pour sa survie.
Mais moi, je ne lui veux pas de mal,
bien au contraire.
Je suis là pour l’éveiller à lui-même, je
suis là pour l’aider à se reconnecter
au Désir, au Divin, au Sacré.
Et lui me rejette.
Mais je ne peux pas t’effacer, puisque tu
es la source même de ma vie, de qui je
suis.
C’est à partir de Toi que je respire, que
mon corps vibre, que mes cellules
dansent.
Comment ai-je pu te faire autant de mal,
en te négligeant, en te reléguant au
fond de ce si joli coffre que je n’ouvre
jamais ?
Ô toi, ma Perle, ma Pépite, ma Flamme,
aide moi à reprendre le chemin qui me
mène jusqu’à Toi.
Aide moi à me
réconcilier, à prendre soin de Toi, de Moi, de Nous.
Je sais ta force.
Elle m’effraie, tu le sais.
J’ai peur de ta puissance.
J’ai peur qu’elle me
conduise à nouveau sur le banc des
accusées, des pècheresses, des
rejetées.
Ô toi, ma perle, ma Pépite, ma Flamme,
aide moi à guérir de mes blessures.
Montre-moi le chemin vers moi-même,
montre moi le chemin qui me mènera à
lui.
Aide-moi à me réunir, à ressentir, à
me sentir.
En cette fin d’été, le sol est
sec.
Si je me laisse être qui je suis, quelle
blessure irréparable vais-je encore lui
infliger ?
Je ne lui veux pas de mal, bien au
contraire.
Je ne veux que son bien.
Alors je me façonne pour me rendre
acceptable à ses yeux, je prends la
forme de ce qui le rassure, je lui laisse
l’impression qu’il est le seul maître à
bord.
Jusqu’au jour où… Jusqu’au jour où le
feu qui vibre en moi se rebelle d’être
si petit, si rabougri, si étouffé.
Jusqu’au jour où la pulsion se fait plus
forte, jusqu’au jour où elle m ‘écartèle,
où elle tord mon ventre, mon dos,
pour exister.
Je ne veux pas
l’entendre, je la comprime, elle n’y
tient plus.
Ô toi, ma Perle, ma Pépite, ma flamme, je sais que tu es là.
Bien sûr que je te sens, là, au fond de
moi.
Je fais tout pour me faire croire
que tu n’es pas là, que tu es autre,
différente, pour me faire croire que tu
n’existes pas.
Ma tête m’invente des histoires pour
que je t’oublie, pour que je te fasse
disparaître.
Aujourd’hui, la pluie vient ouvrir la Terre,
l’ameublir, la libérer.
Je laisse glisser les gouttes sur mon
visage, les larmes roulent sur mes joues.
Ma Terre est prête à accueillir le don du
ciel.
La voie s’ouvre.
La Graine est sur le point d’éclore.
Merci.
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